Poil de Carotte (Delcourt)

Bande dessinée publiée en 2016 aux éditions Delcourt.


D’après le roman de Jules Renard publié en 1894.

« Tout le monde ne peut pas être orphelin » , se répète à l’envi François Lepic, alias Poil de Carotte, humilié quotidiennement par sa mère et ses proches parce qu’il est roux.

Seules la ruse et une lucidité inhabituelle chez un enfant de son âge lui permettent d’échapper au désespoir.

Mais Poil de Carotte, victime, peut devenir à son tour bourreau quand il compense sa frustration sur les animaux.


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Poil de Carotte »

Corbeyran engage le lecteur dans une relecture graphique du classique de Jules Renard, naviguant entre les rivages de l’innocence malmenée et les écueils d’une adaptation contemporaine.

Le trait de Renaud Collard, à la fois vif et expressif, parvient à capturer l’essence visuelle d’une époque révolue, tandis que la palette d’Isabelle Rabarot teinte l’ensemble de nostalgie et de fraîcheur. La bande dessinée se veut un miroir fragmenté, reflétant les morceaux choisis d’une enfance teintée de l’humiliation du jeune François, surnommé « Poil de Carotte » pour sa chevelure flamboyante.

Le scénario de Corbeyran, cependant, semble perdre quelques nuances du texte original dans son transcodage graphique.

Là où Renard avait tissé une toile fine d’implicite et de non-dit, la BD, dans son format inévitablement plus succinct, semble par moments simplifier le propos, le dénudant de certaines subtilités émotionnelles.

Il est indéniable que la bande dessinée suscite une émotion brute, une perturbation visuelle qui vient ébranler le lecteur, peut-être même davantage que le texte lui-même, prouvant la puissance de l’image sur le mot. Cependant, cette force se retrouve contrariée par une narration qui peine à égaler la profondeur psychologique de l’œuvre de Renard, laissant entrevoir des lacunes dans l’exploration des dynamiques familiales complexes et des tourments intérieurs du jeune Poil de Carotte​​​​.

« Poil de Carotte » de Corbeyran et Collard est une œuvre qui interpelle, bouscule, mais ne parvient pas totalement à s’emparer de l’âme de son modèle littéraire. Elle ouvre cependant une fenêtre intéressante sur le dialogue entre texte et image, et invite, malgré ses imperfections, à une réflexion sur la capacité de la bande dessinée à revisiter et à réinventer la littérature classique.

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