Mois : février 2024

Jean-Corentin Carré, L’enfant Soldat – Tome 3

Album publié en 2017 aux éditions Paquet.


couverture bd Jean-Corentin Carré, L’enfant Soldat - Tome 3

Fin 1916, après s’être battu une dernière fois dans l’enfer de Verdun, le jeune Jean-Corentin Carré est envoyé sur le front de Champagne avec sa section.

Sa notoriété du « Petit Poilu du Faouët » est grandissante et glorieuse. Mais son moral est au plus bas. Le garçon est de plus en plus noir.

Il se culpabilise d’être vivant, de voir ses camarades mourir sous ses yeux. Son rêve est de sortir de ces tranchées boueuses.

Quelques semaines passent, son général lui annonce bonne nouvelle. Sa demande de changement d’arme a été acceptée. Il va pouvoir intégrer une célèbre escadrille d’aviation et pouvoir se battre dans les airs !


C’est à Dijon puis à Étampes qu’il effectue son temps d’instruction dans l’aéronautique militaire. Le 23 juillet, il reçoit l’insigne d’élève pilote.

Le 3 octobre, le brevet de pilote de guerre (N°6642) lui est décerné à l’issue d’un stage au camp d’Avord. L’adjudant pilote carré est ensuite affecté à l’escadrille S.O.229, célèbre pour ses combats.

C’est avec elle qu’il se bat dans le ciel de la Meuse. Il effectue des vols de reconnaissance dans un premier temps et devient vite décoré pour avoir abattu 3 avions ennemis.

Mais ce 18 mars 1918, à l’aube, il trouve la mort héroïquement dans un combat aérien au dessus de Souilly. Jean-Corentin Carré est tombé dans un traquenard par quatre avions.

Cette action lui vaut une dernière citation à l’ordre de l’armée, cette fois-ci « S’est défendu énergiquement jusqu’à ce que son appareil soit abattu l’entraînant dans une mort glorieuse ».

Ainsi disparut à l’âge de 18 ans le « Petit Poilu du Faouët », l’un des plus jeunes soldats français de la Grande Guerre. Tout le monde le pleurait dans le pays. Les hautes autorités demandèrent qu’il soit enterré et porté au Panthéon. Un monument a été inauguré à ce jeune combattant juste avant la Seconde Guerre mondiale. Toutes les rues en Bretagne portent son nom. Jean-Corentin Carré est devenu un symbole et un exemple.


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Jean-Corentin Carré, L’enfant Soldat – Tome 3 »

Dans le troisième volet de « Jean-Corentin Carré, L’enfant Soldat« , Pascal Bresson et Lionel Chouin clôturent avec brio la saga du plus jeune combattant de la Première Guerre mondiale.

Ce dernier opus, imprégné de l’atmosphère lourde des combats aériens et de la psyché torturée de son jeune héros, est une fenêtre ouverte sur les abysses de l’âme humaine confrontée à l’inhumanité de la guerre.

Le récit, qui nous transporte des tranchées boueuses aux cieux assiégés, est une étude minutieuse des conflits intérieurs et extérieurs. Jean-Corentin, le « Petit Poilu », évolue dans un monde où le patriotisme juvénile est aussi loué que mis à l’épreuve. La narration de Bresson, précise et poignante, s’accompagne parfaitement des illustrations de Chouin, dont le trait saisit avec acuité les détails de cette époque sombre.

extrait Jean-Corentin Carré, L’enfant Soldat - Tome 3

Le tome s’achève sur la mort tragique du protagoniste, qui, bien que prévisible, n’en est pas moins déchirante. L’auteur ne cherche pas à glorifier la guerre; au contraire, il présente un personnage profondément humain, héros malgré lui, pris dans les machinations d’un conflit qui dépasse son entendement et sa jeune vie.

Les auteurs réussissent le tour de force de rendre hommage à ce soldat sans pour autant tomber dans l’hagiographie. Ils nous présentent un jeune homme courageux et complexe, dont le destin tragique souligne l’absurdité de la guerre.

Ce tome est une réussite tant sur le plan narratif que graphique, offrant une conclusion mémorable et touchante à la série. C’est une œuvre qui mérite sa place non seulement dans les bibliothèques de bande dessinée mais aussi dans les discussions sur la représentation de l’histoire et de la jeunesse dans l’art.



Lieu visité par la bd en Bretagne

Le Faouët

Jean-Corentin Carré, L’enfant Soldat – Tome 2

Album publié en 2017 aux éditions Paquet.


Verdun 1916, côte 321.

Après avoir subi de terribles revers, les soldats français se battent avec acharnement pour refouler l’ennemi à leur point de départ.

C’est une guerre où chacun doit reprendre sa propre tranchée. Jean-Corentin Carré, toujours volontaire pour les missions périlleuses, est apprécié de ses hommes.

Il est nommé pour une seconde citation au mérite en sauvant au périple de sa vie une grande partie des ses poilus d’une mort annoncée.

Pour ce jeune garçon et pour bien d’autres, Verdun reste la plus emblématique, la plus traumatisante des batailles de cette Grande Guerre.

Il a de plus en plus l’impression de devenir une machine à tuer du Boche, l’impression aussi de devenir une bête à tranchée, l’animal qu’on pousse à l’abattoir !

Jean-Corentin Carré prend soudainement conscience que sa place n’est plus dans ces lieux où l’enfer et la mort rôdent. Il veut retrouver sa place d’enfant, retourner étudier à l’école et vivre normalement, comme un gosse de son âge.

Surtout, il tient plus que tout à retrouver sa véritable identité, son vrai nom JEAN-CORENTIN CARRÉ, au lieu de son nom d’emprunt AUGUSTE DUTHOY, qu’il considère comme un nom d’assassin…


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Jean-Corentin Carré, L’enfant Soldat – Tome 2 »

Dans « Jean-Corentin Carré, L’enfant Soldat – Tome 2« , Pascal Bresson poursuit avec brio la narration graphique de la jeunesse tragiquement héroïque de Jean-Corentin Carré dans le chaos de la Grande Guerre.

Le récit, ancré dans les tranchées boueuses de Verdun, est une fenêtre ouverte sur la psyché d’un adolescent combattant, dont la bravoure dépasse l’entendement et défie les horreurs de la guerre.

Bresson tisse une trame où l’historicité et la fiction se rencontrent pour honorer la mémoire collective.

Le dessin de Lionel Chouin, aux traits aussi précis que douloureux, ne se contente pas d’illustrer la guerre ; il la rend palpable, presque insoutenable, nous forçant à ne pas détourner le regard de ce que fut ce conflit dévastateur.

Le jeune Jean-Corentin, dans son uniforme bien trop grand pour son âge, incarne cette innocence perdue, cet élan patriotique qui a poussé tant de jeunes à une fin prématurée.

La série trouve son équilibre dans la dualité de sa narration : elle oscille entre l’admiration pour le courage des soldats et une critique acerbe de l’absurdité de la guerre. Si l’on peut parfois reprocher à Bresson une idéalisation de son protagoniste, c’est peut-être pour mieux souligner la perte de l’humanité dans ce gâchis de vie. Car au-delà de la biographie, c’est bien une allégorie de la guerre et de ses démons que l’auteur nous offre.

« Jean-Corentin Carré, L’enfant Soldat – Tome 2 » est donc plus qu’une simple bande dessinée ; c’est un hommage graphique, un morceau d’histoire narré avec émotion et respect, mais également une réflexion sur la guerre et ses jeunes victimes.

Il nous rappelle que le devoir de mémoire passe aussi par ces récits dessinés, capables de toucher l’esprit et le cœur des générations futures.



Lieu visité par la bd en Bretagne

Le Faouët

Tarzan, l’homme-singe – Tome 1

Album publié une première fois en 2024 aux Editions Glénat.


Adapté du roman de Edgar Rice Burroughs publié en octobre 1912.

Tarzan est un enfant de la jungle et pourtant, il est différent de ceux qui l’entourent. Chétif, imberbe, maladroit… sa place parmi les grands singes ne s’impose que grâce à l’amour que lui porte Kala, sa mère adoptive.

Mais en grandissant, Tarzan reconnait en lui des qualités que les membres de son groupe ne possèdent pas. Il est rusé, patient et ses faiblesses sont largement compensées par sa compréhension d’outils qui s’apparentent pour lui à des extensions de son être.

Petit à petit, Tarzan comprend que la place qui lui revient au sein de sa forêt natale, c’est celle de maître.

Bientôt, il montrera à tous qu’il est le Seigneur de la jungle. Mais c’était sans compter sur sa rencontre avec Jane, une étrange créature qui réussit à provoquer chez Tarzan un émoi qu’il n’avait jamais ressenti jusque-là…

Adaptation fidèle du roman d’Edgar Rice BurroughsTarzan, seigneur des singes nous invite à découvrir l’origine du mythe de ce personnage devenu culte. Dans cette version qui ne subit pas le traitement édulcoré du dessin animé Disney, découvrez un récit tragique et l’histoire de l’avènement d’un homme qui rencontre la civilisation.


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Tarzan, l’homme-singe – Tome 1 »

La bd sortira début octobre 2024.


L’Appel de la forêt (Dequest)

Bande dessinée publiée en 2023 aux éditions Plein Vent


Adapté de l’œuvre de Jack London, publié sous la forme d’un roman pour la première fois en 1903.

couverture bd L Appel De La Foret (Dequest)

L‘appel de la forêt nous livre le témoignage de la ruée vers l’or de 1896 dans la région du Klondike.

Les températures glaciales imposent une vie âpre et rude. Buck, un chien domestique, a été volé.

Attelé à un traîneau, il va connaître le supplice de la piste et devoir s’adapter pour survivre. Nous découvrons un monde dominé par la peur.

Les lois du monde sauvage et la cruauté des hommes vont l’amener à se tourner vers sa nature profonde : devenir un loup parmi les loups.

La bd « L’Appel de la forêt » disponible ici


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bd « L’Appel de la forêt »

Dans l’Alaska impitoyable de la fin du XIXe siècle, la bande dessinée « L’Appel De La Forêt » de Pierre-Emmanuel Dequest retranscrit avec brio la fable intemporelle de Jack London.

Cette adaptation graphique offre une fenêtre ouverte sur le périple brutal et rédempteur de Buck, un chien arraché à la douceur de son foyer et précipité dans les abysses glacées du Klondike.

Dequest, avec une main de maître, taille dans les étendues sauvages un récit de survie où la nature, à la fois mère et bourreau, façonne Buck dans l’adversité. Les dessins, d’une précision chirurgicale, illustrent la transformation du protagoniste canin, dont la domesticité cède la place à un état plus sauvage et authentique.

L’œuvre déploie un scénario dense et un graphisme qui transcende le récit originel. Le souci du détail de Dequest offre aux yeux ébahis des planches où la rigueur du trait se marie à la poésie des paysages enneigés, capturant la grandeur menaçante de l’immensité nordique.

La violence, inhérente à l’époque et au lieu, se reflète dans les interactions entre hommes et bêtes, soulignant une critique sociale subtile de l’exploitation et de la quête effrénée d’enrichissement. Buck, victime puis acteur de son destin, incarne un désir de liberté et d’indépendance, un écho à l’appel primal de la forêt qui résonne en chaque être.

Cette bande dessinée n’est pas simplement une adaptation ; c’est une réinterprétation artistique, un hommage qui s’élève au-delà de l’œuvre originale, invitant à une introspection sur la condition animale, la brutalité humaine et la quête éternelle d’émancipation.

Dequest ne se contente pas de raconter une histoire — il nous la fait vivre avec une intensité palpable, faisant de « L’Appel De La Forêt » une expérience graphique qui hante bien après la dernière page tournée.


Toutes les bd adaptées de l’œuvre de Jack London

Missak Manouchian – Une vie héroïque

Publié aux éditions Dupuis en 2024.


Découvrez la vie de Missak Manouchian, résistant étranger mort pour la France.

couverture bd Missak Manouchian - Une vie héroïque

« Ma chère Mélinée, ma petite orpheline bien-aimée,Dans quelques heures, je ne serai plus de ce monde.

On va être fusillés cet après-midi à 15 heures. Cela m’arrive comme un accident dans ma vie, je n’y crois pas, mais pourtant, je sais que je ne te verrai plus jamais.

Que puis-je t’écrire, tout est confus en moi et bien clair en même temps. […] Au moment de mourir je proclame que je n’ai aucune haine contre le peuple allemand et contre qui que ce soit, chacun aura ce qu’il méritera comme châtiment et comme récompense. […]Je mourrai avec mes 23 camarades tout à l’heure avec le courage et la sérénité d’un homme qui a la conscience bien tranquille, car personnellement je n’ai fait mal à personne et si je l’ai fait, je l’ai fait sans haine. »

Extrait de la lettre de Missak Manouchian à sa femme Mélinée.

Le 21 février 1944, Missak Manouchian et vingt et un membres de son groupe de Résistance sont fusillés dans la clairière du Mont-Valérien. Rescapé du génocide arménien, orphelin, apatride, poète, résistant, amoureux de vivre à en mourir, voici son histoire. Une vie héroïque!

Le 21 février 2024, Missak Manouchian entre au Panthéon. Cet album est complété par un dossier réalisé par Denis Peschanski sur le rôle décisif des étrangers dans la Résistance.

couverture bd Ivanhoé Tome 3

L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Missak Manouchian mort pour la France »

La bande dessinée « Missak Manouchian – Une vie héroïque », écrite par Didier Daeninckx et illustrée par Mako, offre une immersion graphique dans l’épopée tragique d’un héros méconnu de la Résistance française.

L’œuvre, enrichie par un dossier historique de Denis Peschanski, se présente non seulement comme un récit biographique mais aussi comme un hommage vibrant à la lutte contre l’oppression et le fascisme.

Dans les traits épais et les ombres marquées de Mako, on découvre le visage d’un homme, Manouchian, dont l’existence se confond avec l’Histoire avec un grand H. L’artiste parvient à capturer l’essence d’une époque révolue, offrant une fenêtre sur les aspirations et les désillusions d’un combattant de l’ombre.

Les reproductions d’affiches d’époque insérées parmi les planches renforcent l’authenticité historique et plongent le lecteur dans le contexte sociopolitique de la France occupée.

Didier Daeninckx, avec une plume respectueuse et documentée, trace le portrait d’un homme animé par la poésie et la justice, dont l’engagement indéfectible envers la liberté se heurte à la brutalité d’une guerre qui n’épargne ni les rêves ni les poètes. L’écriture est à la fois sobre et poignante, incarnant la voix d’un résistant qui a lutté non seulement avec des armes mais aussi avec des mots.


Lieux visités par la bd pendant la Seconde Guerre Mondiale

Mont ValérienParis

Charly 9

Bande dessinée publiée en 2013 aux éditions Delcourt.


D’après le roman de Jean Teulé publié en 2011.

couverture bd Charly 9

Charles IX fut de tous les rois de France l’un des plus calamiteux. À 22 ans, pour faire plaisir à sa mère, il ordonna le massacre de la Saint- Barthélemy qui épouvanta l’Europe entière.

Abasourdi par l’énormité de son crime, il sombra dans la folie.

Transpirant le sang par tous les pores de son pauvre corps décharné, Charles IX mourut à 23 ans, haï de tous…

Pourtant, il avait un bon fond.


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Charly 9 »

Dans les méandres de l’histoire française, il y a des figures tragiques que seul l’art peut réhabiliter, ou du moins, éclairer sous une lumière plus nuancée. La bande dessinée « Charly 9 » de Richard Guérineau, adaptation du roman éponyme de Jean Teulé, est une tentative réussie de peindre la tragédie d’un roi malgré lui, Charles IX, à travers les prismes colorés de la bande dessinée.

Guérineau, avec une palette où le rouge sang et le noir profond prédominent, nous plonge dans les tumultes d’une époque révolue mais dont les échos résonnent encore. Le traitement graphique, mélangeant habilement lavis traditionnel et retouches numériques, apporte une profondeur et une gravité à ce récit historique.

Chaque page est un contraste frappant entre la légèreté de l’existence et la lourdeur du destin, entre les clins d’œil humoristiques et la réalité macabre d’un règne marqué par le sang.

extrait bd Charly 9

« Charly 9 » ne se contente pas de retracer des événements ; il offre une introspection dans l’âme d’un roi jouet des volontés maternelles, un souverain tourmenté par la culpabilité et rongé par la folie.

La montée en puissance du rouge dans les pages est symptomatique de cette descente inexorable vers la démence. L’humour, parfois noir, parfois décalé, sert de soupape à la tension narrative, rendant l’œuvre d’autant plus poignante.

La BD de Guérineau est un véritable tour de force, qui allie recherche historique minutieuse et créativité artistique. Elle s’adresse non seulement aux passionnés d’histoire, mais aussi à ceux qui cherchent dans l’art une porte vers les complexités de l’âme humaine.

« Charly 9 » est une réflexion sur le pouvoir et la folie, un miroir tendu à notre époque qui, malgré les siècles, ne semble pas avoir fini de répéter les erreurs du passé.

Je, François Villon – Tome 02

Bande dessinée publiée en 2014 aux éditions Delcourt.


D’après le roman de Jean Teulé publie en 2006.

Bienvenue parmi les ignobles

couverture Bd Je, François Villon - Tome 02

François Villon fait la rencontre de Colin de Cayeux, chef des Coquillards, brigands pervers et sanguinaires.

Pour être initié, Villon doit réaliser trois chefs-d’oeuvre : un vol scandaleux, un crime écoeurant et un présent abominable.

Ainsi, il volera une femme qui enterre son enfant, égorgera une pauvre prostituée et, sur demande de Colin, il offrira sa femme… Bienvenue parmi les ignobles !


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Je, François Villon – Tome 02 »

Au fil des pages du second tome de « Je, François Villon« , Luigi Critone plonge le lecteur dans les abysses d’une âme torturée, où la légende noire du poète maudit prend toute son ampleur. Loin de la verve légère et de l’esprit facétieux du premier volume, cette suite déroule le tapis de l’obscurité sous les pas d’un Villon plus sombre, dont la descente aux enfers est aussi irrésistible qu’effrayante.

La force de ce tome réside dans la capacité de Critone à saisir le paradoxe d’un Villon à la fois poète et scélérat. La plume se fait ici pinceau, dessinant les contours d’un homme écartelé entre la grandeur de son art et la bassesse de ses actes.

Les illustrations, bien que magnifiques, portent en elles la noirceur d’un récit qui ne fait pas l’économie de la violence. Les actes de Villon, peints avec une précision qui frôle parfois la caricature, sont un rappel glaçant que derrière la poésie se cache parfois la brutalité la plus crue.

extrait bd Bd Je, François Villon - Tome 02

Critone nous convie à une réflexion sur la nature humaine, où la noblesse de l’art de Villon se heurte à ses choix moralement discutables. Le lecteur se trouve alors dans l’inconfort de la dualité, à la fois captivé par le talent indéniable du poète et repoussé par ses actions répréhensibles. L’auteur questionne subtilement les limites de notre empathie, nous forçant à contempler l’homme dans toute sa complexité.

Cependant, cette noirceur omniprésente peut susciter une certaine lassitude. L’accumulation des scènes d’une violence graphique peut parfois sembler gratuite, éclipsant la subtilité que l’on attend d’une œuvre qui se veut aussi littéraire. Ce choix audacieux de Critone risque de diviser : est-ce un hommage appuyé à la légende de Villon ou une simplification excessive d’une figure historique complexe ?

« Je, François Villon – Tome 02 » est une œuvre qui ne laisse pas indifférent. Critone y fait preuve d’une maîtrise artistique indéniable, mais le lecteur pourrait regretter que l’obscurité du récit prenne le pas sur la lumière de la poésie.

Une chose est certaine : ce Villon-là ne cessera de hanter ceux qui auront osé s’aventurer dans les méandres de son âme tourmentée.

Voyage avec un âne

Bande dessinée publiée en 2024 aux éditions Futuropolis.


Librement adapté du récit de Robert Louis Stevenson publié en juin 1879.

En septembre 1878, Robert Louis Stevenson a 28 ans. Accompagné de Modestine, une ânesse rétive, il traverse en douze jours les Cévennes, de Monastier à Saint-Jean-du-Gard.

Dormant sous les étoiles qui avaient éclairé la révolte des camisards, se lavant dans l’eau courante des rivières, amical envers les moines trappistes comme envers les dissidents protestants, il découvre la magie des rencontres, la complicité des paysages, l’ivresse de la liberté.

Lui qui est parti sur la route à la suite de sa rupture avec Fanny Osbourne, une américaine mariée de 10 ans son aînée, il trouve en chemin toutes les raisons de croire en l’amour qui va changer son existence et ramène le livre le plus cordial et le plus confiant en la vie.

Après la mort de Stevenson, le succès du livre et l’engouement pour ce voyage se développent au point qu’en 1978, pour le centenaire, cette randonnée de 220 kilomètres est devenue « le chemin de Stevenson » sous le nom de GR70 !

À partir du livre de l’écrivain écossais, mais aussi à travers sa correspondance, Perrissin et Sterckeman adaptent fidèlement son récit mais aussi le contexte de son voyage.


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Voyage avec un âne »

Dans « Voyage avec un âne dans les Cévennes« , Christian Perrissin et Matthieu Blanchin revisitent avec brio le récit de voyage de Robert Louis Stevenson. Cette adaptation en bande dessinée, fidèle à l’esprit du texte original, offre une expérience de lecture immersive et poétique.

Perrissin et Blanchin ont su préserver l’essence du récit de Stevenson en respectant son ton et son rythme. Les dialogues, savoureux, et les personnages, attachants, sont dépeints avec justesse et sensibilité.

L’âne Modestine, compagnon de route de l’écrivain écossais, devient un véritable personnage, doté d’une personnalité propre. Sa relation avec Stevenson, faite de complicité et de confrontation, apporte une touche d’humour et de tendresse à l’histoire.

extrait Voyage avec un âne

La dimension poétique de l’œuvre est indéniable. Les paysages des Cévennes, magnifiquement illustrés par Blanchin, sont mis en valeur par une palette de couleurs automnales qui confère à l’ensemble une atmosphère douce et mélancolique. Les cases, souvent dépourvues de texte, laissent une large place à l’image et invitent le lecteur à la contemplation.

« Voyage avec un âne » est également une réflexion sur la condition humaine et le rapport de l’homme à la nature. Au fil de son périple, Stevenson rencontre des personnages hauts en couleur, qui lui permettent de questionner ses propres valeurs et de porter un regard critique sur la société de son époque.

« Voyage avec un âne » est une adaptation réussie du récit de Stevenson. Servie par un scénario fidèle et un dessin délicat, cette bande dessinée est une invitation au voyage et à la réflexion, qui saura séduire les amateurs de littérature et de belles images. Une promenade poétique et introspective à ne pas manquer.

Jusqu’ici tout va bien

Bande dessinée publiée en 2024 aux éditions Rue de Sevres.


D’après le roman de Gary D. Schmidt publié en 2017.

1968, dans une petite ville de l’État de New York.

Un père sans repères, une mère sans remède. Deux grands frères, l’un brutal, l’autre avalé par la guerre du Vietnam.

Pas assez d’argent à la maison, des petits boulots pour se maintenir à flot. Trop de bagarres au collège. Une bibliothèque ouverte le samedi pour s’évader.

Une collection d’oiseaux éparpillée à tous les vents. Des talents inexploités. Et une envie furieuse d’en découdre avec la vie.

Dans ce contexte sinistre mais pas dénué d’espoir, Doug s’efforce de ne plus être ce que tout le monde semble penser qu’il est, un « voyou maigrichon ».

Grâce à Lil, alliée inattendue, il va trouver la force d’affronter le passage de l’adolescence et l’envie de rêver à des horizons plus radieux.


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Jusqu’ici tout va bien »

Jusqu’ici tout va bien‘ de Nicolas Pitz est une adaptation graphique remarquable du roman éponyme de Gary D. Schmidt. L’histoire, située en 1968 dans une petite ville de l’État de New York, suit le parcours de Doug, un adolescent en quête d’identité dans un environnement familial et social chaotique.

Le récit, sombre mais empreint d’espoir, est porté par un dessin fin et expressif, majoritairement en noir et blanc, où la couleur, utilisée avec parcimonie, devient un véritable outil narratif. Pitz réussit à transmettre avec justesse les émotions et les tourments de Doug, personnage central attachant et résilient.

L’adaptation est fidèle au roman original, tout en offrant une nouvelle perspective grâce au médium de la bande dessinée. Pitz parvient à retranscrire la subtilité des rapports familiaux et humains, évitant ainsi le pathos. L’œuvre rend également hommage à Jean-Jacques Audubon, illustrateur naturaliste méconnu, dont les dessins d’oiseaux sont une révélation pour Doug.

Les thématiques abordées sont nombreuses et universelles : la résilience, l’amitié, la découverte de l’art et de la littérature, le tout dans le contexte de la guerre du Vietnam. Le lecteur ne peut que s’attacher à Doug, jeune homme en pleine construction, qui évolue tout au long de l’histoire.

‘Jusqu’ici tout va bien’ est une lecture forte et émouvante, une adaptation graphique réussie d’un roman inoubliable. Les touches de couleur, utilisées avec subtilité, renforcent la puissance du récit. Une magnifique découverte, à la fois coup de cœur et coup de poing, qui ne laissera personne indifférent.

Le combat d’Henry Fleming

Bande dessinée publiée en 2024 aux éditions Dupuis.


D’après le roman The Red Badge of Courage, de Stephen Crane publié en octobre 1895.

bd Le combat d Henry Fleming

Henry Fleming, un jeune fermier de 18 ans, a quitté sa mère pour s’engager dans l’armée nordiste. Mais au fur et à mesure que le temps passe sans qu’il combatte ni aperçoive un seul rebelle sudiste, la motivation d’Henry s’effiloche.

Jusqu’au jour où arrive la nouvelle que la bataille est pour bientôt…

Cette fois, Henry n’a d’autre choix que de se poser clairement la question : aura-t-il le courage de participer à la grande boucherie des marées humaines se percutant ?

Il trouvera la réponse au cœur des détonations de la bataille, mais aussi du dialogue mené avec lui-même dans l’intimité de son âme tourmentée…

Une somptueuse charge pacifiste interrogeant le concept d’héroïsme, adaptation libre de The Red Badge of Courage, de Stephen Crane, monument de la littérature américaine.

Une nouvelle manière pour Steve Cuzor, après Cinq branches de coton noir, d’explorer le mythe américain.


L’avis d’histoiregeobd.com sur la bande dessinée « Le combat d’Henry Fleming »

Dans « Le Combat d’Henry Fleming« , Steve Cuzor nous convie à un périple graphique à travers les doutes et les désillusions d’un jeune soldat dans la guerre de Sécession, adaptation du roman de Stephen Crane. Cet album, publié dans l’éminente collection Aire Libre de Dupuis, est bien plus qu’une simple transcription visuelle : c’est une réinterprétation qui brasse l’intimité du courage et la brutalité de la guerre.

Cuzor, déjà salué pour son travail dans « Cinq Branches de coton noir », poursuit ici son exploration du noir et blanc avec une bichromie qui souligne avec acuité le contraste entre les idéaux de la jeunesse et la réalité du front. Son dessin réaliste, évoquant les grands noms de la bande dessinée classique, sert un récit où chaque trait semble porter en lui le poids de l’histoire et la fragilité de l’humain.

L’album excelle dans sa capacité à rendre les mouvements de troupes et les conflits internes d’Henry avec une intensité rare.

On est loin des clichés héroïques de la guerre : ici, la peur, la fuite et le retour au combat sont dépeints avec une sincérité déroutante, faisant de cette BD une expérience presque palpable. Cuzor ne se contente pas de reproduire des scènes de bataille ; il nous immerge dans l’esprit tourmenté de son protagoniste, rendant son introspection universelle.

L’adaptation est judicieuse, concentrée sur l’essence du personnage et de ses tribulations intérieures plutôt que sur des descriptions littéraires superflues. C’est une œuvre qui invite à la réflexion sur le concept de courage et la condition humaine au sein du chaos de la guerre.

« Le Combat d’Henry Fleming » est donc une œuvre magistrale qui, grâce à la maîtrise de Cuzor, devient un miroir de nos propres peurs et de notre recherche de bravoure.